Romanzi. Leggerli, scriverli
et
L'arte di raccontare

Ce volume, paru en septembre 2007 dans la collection Feltrinelli, rassemble et développe, sous une forme accomplie, un sujet que De Marchi a traité dans une série de conférences depuis 1999 et veut constituer - selon les déclarations de l'auteur - «une réflexion libre, ouverte et sincère» sur le genre littéraire du roman : il ne s'agit pas d'une «énième théorie du roman», mais d'un ensemble de considérations menées sur les deux versants de la lecture et de l'écriture.
     L'essai s'interroge sur le fait surprenant que les romans, faits de papier imprimé et de «substance imaginaire», ont le pouvoir d'isoler de leur vie réelle, pendant des heures, des personnes de tout âge et de toute culture par la seule force des mots : du moment que (et le fait que cette constatation soit élémentaire ne diminue nullement son importance) un roman est formé «exclusivement de mots», que s'est «un mouvement de mots»: et ceci de manière plus évidente que celui qui écrit puis celui qui lit, se déplace d'un mot et d'une phrase à l'autre, sur toute l'étendue du texte. Les conséquences de cette affirmation sont multiples et font l'objet des huit chapitres du livre.
     Certes, chaque texte présente un mouvement verbal ; cependant, alors qu'un texte, par exemple philosophique, fait avancer la lecture au moyen de l'enchaînement de ses arguments, le texte romanesque vit de son mouvement narratif spécifique ; et étant donné que la narration est toujours la narration de quelque chose, ce sera toujours une matière factuelle (ou plutôt pseudo-factuelle) qui sera narrée. Ceci étant l'unique, bien qu'incontournable, lien ténu entre le roman et la réalité. Même lorsqu'il avance des prétentions réalistes, le roman, en fait, ne représente qu'en moindre partie la réalité : il condense plutôt, dans son propre tissu verbal, une manière de la voir et de la sentir. Et même lorsque la lecture semble exiger l'appui d'une image mentale (comme dans la célèbre description au début des Promessi sposi) le regard que le romancier, et avec lui le lecteur, porte sur le monde est «un regard linguistique». Lire, cela ne signifie pas rêver les yeux ouverts. A plusieurs reprises, en examinant non seulement la perceptibilité des descriptions mais aussi la représentation des personnages et de leurs voix dans les dialogues, la structure temporelle et la position du narrateur au sein du roman, on peut ajouter à la conclusion que «dans le roman, tout est mot, du lieu du récit au récit et à la pensée». Le lecteur ingénu pourra se laisser séduire par le fil extérieur de la trame, le lecteur réfléchi, en revanche, trouve seulement dans le déploiement de la narration en mots l'émotion désintéressée en laquelle consiste le plaisir (littéraire) de la lecture.
     Mais, si les choses narrées dans le roman ne constituent pas une description factuelle, si elles n'existent pas hors des mots qui les racontent, alors même la tâche de la traduction risque d'être désespérée, comme l'explique l'intéressant chapitre 7 du livre. Mais, la nette séparation entre le roman et la réalité entraîne une ultime suite logique quant à l'unique engagement possible du narrateur : celui de raconter et rien d'autre.   

En revenant à ce sujet dans les trois chapitres de L'arte di raccontare (Edizioni di storia e letteratura, Roma 2013) De Marchi résume et approfondit certains aspects de son essai de 2007. Il y ajoute aussi une toute nouvelle partie autour de la question «de la mode et des changements» en littérature. Ce petit livre examine avec la plus grande clarté comment la narration littéraire se construit à partir des unités lexicales, syntaxiques et métaphoriques les plus petites pour arriver à des éléments de récits, créant ainsi un «mouvement de la parole» qui plonge (ou ne plonge pas) le lecteur dans un état d'«émotion littéraire», état qui diffère radicalement de l'émotion psychophysiologique de la vrai vie. Le dernier chapitre est riche en observations critiques sur l`avant-garde, le postmodernisme et les dernières tendances de la fiction.





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